Cera Coop Explore chez Agribio

Cera Coop Explore Agribio
02 février 2016 14:00
Coopératives de producteurs

Dans le cadre de l'appel à projets "Coopérer pour innover", l’équipe de Cera a emmené un groupe à la découverte de la coopérative Agribio, située à Havelange. En 2015, Agribio a été élue lauréate du Prix du Développement Durable de la Province de Namur et nominée pour le Grand Prix des Générations Futures.

 

Lisez notre compte-rendu ci-dessous

La maîtrise des prix en coopérant

Agribio, c’est l’histoire de deux agriculteurs, Bruno Greindl et Herman Pirmez, qui ont décidé d’unir leur force pour s’armer contre les fluctuations du prix du grain. Créé en 2000, Agribio est une coopérative de producteurs qui est aujourd’hui composée de quatre coopérateurs-agriculteurs qui partagent la passion de la culture de céréales mais également les mêmes défis.

L’objectif initiale d’Agribio était d’offrir un prix juste et maîtrisé à ses coopérateurs. Le prix de la farine étant plus stable que celui des céréales, Agribio commença ses activités en proposant une transformation du grain en farine, au départ, auprès d’un moulin hollandais. C’est ainsi qu’est née la marque « Agribio ».
Dès 2008, deux coopérateurs (non agriculteurs), dont Christophe Portier, ont rejoint l’aventure pour les épauler dans les tâches administratives et commerciales.

 

Un modèle coopératif basé sur la délégation

« J’avais entendu parler de coopératives, nous dit Christophe Portier, mais ça me semblait être un monde un peu bizarre car tout le monde peut décider. C’est l’idée que j’avais des coopératives jusqu’à ce que j’arrive ici. Ce qui intéresse les coopérateurs-agriculteurs c’est de vendre leur grain à un bon prix et de participer à un projet sympa et concret. Mais ils n’ont pas le temps de choisir la couleur de l’étiquette. »


Pour mener à bien ce projet coopératif, les six coopérateurs, (agriculteurs et non-agriculteurs) ont nommé deux administrateurs délégués, Bruno Greindl et Christophe Portier, chargés de la gestion et des principales prises de décision concernant la coopérative Agribio.

 

Une valorisation du grain 100% belge !

Christophe Portier : « En Belgique, il y avait une réelle demande pour une farine à base de céréales « belges », mais c’était un peu tricher, puisque le grain partait en Hollande, pour revenir en Belgique sous forme de farine »
Afin de proposer une farine 100% belge, la coopérative a décidé d’étendre ses activités en achetant un premier moulin. Grâce à cette acquisition, Agribio a « gagné en pouvoir » en renforçant son indépendance.
Agribio a un engagement fort envers la communauté : aller au-delà d’une simple activité économique, l’envie de rester sur le territoire et d’être transparent.

 

Mais Agribio voulait encore en faire plus !

« Nous voulions aller le plus loin possible dans la transformation du grain. (…) En 2011, Laurent, un boulanger (français), nous a rejoint », raconte Christophe Portier.
En diversifiant les étapes de transformation, la coopérative offre, à présent, des produits-finis 100% belges : farine, pains ou encore viennoiseries. Ces dernières ont été testées et approuvées par les participants du Coop Explore ! Encore merci pour cette dégustation !
Pour le plaisir de vos papilles, ces gourmandises sont disponibles dans divers points de vente notamment des magasins bio, ‘la ruche qui dit oui’ ou encore des GAC (Groupes d’Achats Communs). Notons qu’Agribio propose également du muesli, dont la production est sous-traitée, du moins, à ce jour… « On ne sait pas tout faire. Ce sont des métiers différents. Il faut à chaque fois se poser la question ‘Est-ce que l’investissement est rentable?’ L’intérêt est toujours de valoriser le grain, d’arriver à un prix stable à long terme.», dixit Christophe Portier.
Grâce à une diversification de ses activités mais également de son réseau de distribution, la coopérative est autonome et indépendante. Elle gère un circuit complet sans être dépendante des clients, des fournisseurs ou de l’Etat.

 

Création d’emplois au niveau local

L’étendue des activités menées par la coopérative a nécessité d’inclure certains corps de métier. C’est ainsi qu’Agribio offre un emploi à 18 passionnés : boulangers, livreurs, meuniers ou encore pâtissiers. Grâce à ce travail artisanal, la coopérative se réapproprie son produit en valorisant sa farine au moyen d’un atelier de boulangerie que nous avons eu la chance de visiter. Christophe Portier : « Et créer de l’emploi dans la région, c’est aussi un bénéfice ! »
Des produits biologiques et de proximité !
Par ailleurs, les ingrédients sont rigoureusement sélectionnés par la coopérative. Tous les produits Agribio s’inscrivent dans une démarche de circuit court puisque le lait, les œufs et le beurre proviennent de fermes locales. De plus, Agribio se fournit exclusivement auprès de producteurs bio.

En quelques chiffres :

  • 20 heures par jour, 5 moulins transforment les grains en farine (blanche, grise ou complète).
  • Chaque moulin traite 15 kilos de céréales par heure.
  • Quelques 750 tonnes de grains ont été achetées en 2015.
  • Quotidiennement, entre 2000 et 4500 pains et/ou viennoiseries sont produit(e)s.
  • Les vendredis et samedis, 14 boulangers se relaient entre 7h et 2h du matin. Soit 19 heures de travail en continu.
  • Environ 100 points de vente sont livrés
  • L’investissement représente au total plus de 700.000 euros.

« Ce n’est pas parce que c’est une coopérative que tout est beau tout est rose. Chacun a des intérêts personnels en jeu. » nous explique Christophe Portier.

 

La coopérative ne peut se permettre de suivre l’envolée du prix du grain. Cependant, les coopérateurs peuvent choisir de vendre leurs céréales en dehors de la coopérative si le prix d’achat proposé ne leur convient pas… Un cas de figure déjà rencontré par le passé. Or, « l’intérêt est de payer un juste prix à l’agriculteur pour la production obtenue sur son hectare (…) Agribio et l’agriculteur doivent être en mesure de dégager un bénéfice. C’est pourquoi la coopérative fixe un prix à long terme. ». Christophe Portier nous explique alors que la coopérative a convenu avec l’ensemble de ses coopérateurs-agriculteurs de maintenir le prix d’achat des céréales dans une fourchette de prix définies et acceptées par tous.

Bien qu’Agribio ait pris du temps à devenir rentable, le bénéfice est inévitablement positif pour les coopérateurs-agriculteurs. Dans une coopérative, la rentabilité n’est pas nécessairement à la dernière ligne. Pour les coopérateurs-agriculteurs, par exemple, la plus-value de la coopérative se situe dans le prix d’achat des matières premières et la valorisation des céréales dans un bon produit.

 

De la coopération entre producteurs-agriculteurs à la coopération entre coopératives !

Le 12 février 2016, une nouvelle coopérative, « Agribio Färm », a débuté ses activités. Une collaboration entre Agribio et Färm. Le conseil d’administration est composé de quatre administrateurs : deux d’Agribio et deux issus de Färm.
Färm est une chaîne de magasins bio située à Bruxelles qui proposera dorénavant une large gamme de produits Agribio. Pour offrir encore plus de transparence à ses clients, mais également pour réduire le chemin parcouru par les produits, l’atelier boulangerie d’Agribio Färm se chargera de la production dans un des magasins bruxellois. Une collaboration qui promet d’être enrichissante !
« Agribio Färm a beaucoup de choses à nous apprendre. Nous, « petits fermiers » de Buzin, on met le doigt en l’air, on voit si ça passe. Si ça passe, tant mieux, sinon tant pis. Ils vont nous donner des repères, des guides à suivre », complète Christophe Portier.

Un concurrent peut devenir un collègue

En effet, un jeune ingénieur agronome vient de rejoindre l’aventure pour développer des pâtes Agribio. Depuis peu, Agribio coopère également avec la toute jeune coopérative Cycle-en-Terre en mettant à sa disposition certaines terres et des locaux. Cycle-en-Terre est active dans le production de semences et, explique Christophe Portier, « on espère que la petite semence va pousser et pourquoi pas trouver des connexions entre Agribio et Cycle-en-Terre ». En outre, Agribio partage volontiers ses secrets de fabrication en accueillant régulièrement des boulangers.

 

« Dans le business conventionnel, ça ne se fait pas de recevoir un futur concurrent. (…) Mais ça paie ! Un concurrent peut devenir un collègue avec lequel on peut partager et échanger nos expériences. » ajoute encore Christophe Portier.

 

Un modèle coopératif qui évolue !

La coopérative de producteurs-agriculteurs se transforme peu à peu en une coopérative multistakeholders, une coopérative qui réunit plusieurs parties prenantes avec des intérêts potentiellement contradictoires. Dans le cas d’Agribio: les coopérateurs-agriculteurs, les coopérateurs non-agriculteurs, Agribio Färm ou encore Cycle-en-Terre.
Par ailleurs, Agribio souhaiterait davantage impliquer ses ouvriers et ses employés. Christophe Portier : « Leur donner la possibilité de devenir coopérateur ou de participer aux prises de décisions pourrait être un bon moyen ». Un modèle coopératif avec une nouvelle partie prenante ?
Enfin, lorsque des bénéfices sont dégagés, ceux-ci sont entièrement réinvestis en vue d’étendre à nouveau ses activités. Après la filière céréalière, une filière viandeuse pourrait ainsi voir le jour… De beaux défis en perspective !
Bonne continuation et plein succès pour les futurs projets !

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